Les choses à savoir pour choisir votre programme de fidélité aérien

Les gens ont souvent tendance à choisir par défaut le programme de fidélité de la compagnie avec qui ils voyagent le plus souvent mais ça n’est pas toujours un bon calcul.

La plupart des voyageurs ne choisissent pas leur programme de fidélité aérien : il s’impose à eux de lui-même. Soit ils choisissent par réflexe celui de leur compagnie nationale soit, plus exceptionnellement, un autre si pour certaines raisons ils vont fréquemment dans une région du monde qui rend un autre choix pertinent.

Ainsi le français choisira Flying Blue le programme de fidélité d’Air France KLM, le scandinave SAS Eurobonus, l’allemand Miles&More de Lufthansa et l’américain en général celui de son choix entre AAdvantagee (American Airlines), Skymiles (Delta) ou Mileage Plus (United) même si le paysage US est spécifique et peut justifier des stratégies différentes.

Et bien ça n’est pas toujours le meilleurs choix. Nous ne disons pas que c’est un mauvais choix, juste que ça n’est pas toujours le meilleur.

Un programme de fidélité aérien ? Pour quoi ?

Avant d’aller plus loin il faut savoir ce que vous attendez d’un programme de fidélité aérien. En effet tout le monde n’en attend pas la même chose et donc cela va largement conditionner votre choix.

Les billets prime : votre seul objectif est de gagner des miles prime pour vous acheter des billets gratuits (enfin pas si gratuits…vous les avez en quelque sorte payés avant pour les mériter). Dans ce cas deux sujets vous intéressent : les barèmes d’acquisition et de rachat (redemption) de miles.

Le statut : ce qui vous intéresse c’est l’acquisition de miles statut pour obtenir un statut qui vous procurera des avantages divers comme l’accès aux salons, les files prioritaires, ou encore être prioritaire en cas de surclassement (mais n’attendez rien sur ce point, le surclassement n’est en rien un droit, c’est juste que si une compagnie est contrainte de surclasser des passagers il y davantage de chances que ça tombe sur vous).

Bien sur les deux sont liés. Pour avoir un statut il faut beaucoup voyager ce qui à la fin donne beaucoup de miles à dépenser. Mais disons que dans un cas le passager essayera dès qu’il le peut de s’offrir un billet prime alors que dans le second cas il accumule, accumule et peut être un jour se dit « tiens, si je m’achetais un billet prime? ». Et comme de manière un peu mesquine les billets primes ne permettent pas de gagner de miles statut, celui qui fait attention à son statut ne voyagera jamais avec un billet prime tant qu’il n’a pas assuré le renouvellement de son statut.

Et, réciproquement, le chasseur de billets primes finira parfois avec un statut à force de cumuler des miles mais ça n’est pas aussi systématique. Certaines personnes voyagent pendant très longtemps pour s’offrir un billet prime en long courrier pour leurs vacances sans jamais obtenir aucun statut

Les choses à savoir pour le chasseur de billets primes

Si votre seul intérêt est de pouvoir vous acheter des billets prime vous devez donc optimiser à la fois le gain et la dépense de miles.

Gagner des miles

Le premier est assez simple à évaluer car on a affaire à des barèmes fixes : en fonction de votre classe de voyage, de la distance parcourue, et le plus souvent du prix du billet vous savez combien de miles prime vous allez gagner. Cette information est disponible en général sur le site de la compagnie ou alors il y l’excellent Wheretocredit.

Vous vous rendrez toutefois compte qu’il y a deux modèles.

  • certains programmes vous font gagner des miles en fonction de la distance et de la classe de réservation (donc indirectement en fonction du prix). Exemple : SAS Eurobonus
  • d’autres ne prennent en compte que le prix payé : 1 euros = x miles. (revenue based). Exemple : Air France-KLM Flying Blue, Lufthansa, c’est logiquement le modèle le plus en vogue aujourd’hui car il corrèle directement les dépenses du passagers et les gratuités dont il dispose.

Une chose à savoir : si vous êtes du genre à chasser les tarifs discounts le second modèle sera moins intéressant pour vous que le premier d’autant plus que le plus souvent il ne prend en compte que le prix hors taxes du billet. Et des taxes sur un billet il y en a beaucoup.

Il y a également le cas des cartes de crédit cobrandées qui permettent de gagner des miles prime. Nous ne traiterons pas ce point en profondeur car ces cartes ne sont accessibles qu’en fonction de votre localisation géographique donc si vous ne vivez pas dans le pays de votre programme de fidélité vous n’y avez pas droit. De plus les cartes de crédit cobrandées sont beaucoup moins intéressantes en Europe qu’aux Etats-Unis.

Là vous allez déjà vous rendre compte que certains programmes sont plus généreux que d’autres mais ça n’est pas tout. Rien ne sert de gagner beaucoup de miles si le coût des billets prime est élevé ou si ces billets sont peu disponibles.

Seconde chose à savoir : quand une compagnie a un programme « revenue based » cela ne s’applique qu’aux vols vendus par elle. Il est donc souvent intéressant de voyager avec des compagnies partenaires car le modèle distance*classe de voyage s’applique toujours dans ce cas ! Je me souviens à une époque avoir enchainer les Londres-Jakarta sur Garuda en business ou première classe en gagnant des miles Flying Blue à la pelle, dans des proportions énormes par rapport au prix du billet.

Dépenser des miles

Pour ce qui est du coût des billets prime là aussi il y a deux écoles : la tarification fixe ou dynamique.

  • tarification fixe : un billet prime a un prix fixe en miles en fonction des zones géographiques de départ ou d’arrivée.
  • tarification dynamique : comme le prix du billet « normal », le prix en miles varie en fonction de l’offre et de la demande, donc du yield management.

Ce qu’on constate ces derniers temps est que le second modèle devient de plus en plus populaire et qu’il fait s’envoler le prix des billets prime, en plus de l’habituelle dévaluation qui affecte régulièrement le prix de base du billet.

Un autre facteur est à prendre en compte : combien de sièges sont disponibles pour être échangés contre des miles. Sur certaines compagnies un grand nombre de sièges sont disponibles sur chaque vol, sur d’autres beaucoup moins, rendant l’utilisation de miles difficile et très chère. Il est également de plus en plus courant de rendre les cabines les plus prestigieuses inaccessibles aux billets prime pour maintenir leur exclusivité ou de réserver cette possibilité aux clients elite des programme de fidélité. Par exemple vous ne pourrez pas acheter un billet prime en classe La Première sur Air France si vous n’êtes pas Flying Blue Platinum.

Enfin il y a l’accès à l’inventaire des compagnies partenaires. En effet les compagnies aériennes sont partenaires au sein d’alliances, on peut gagner des miles en voyageant sur une compagnie partenaire et donc on devrait également pouvoir les dépenser ainsi. Dans les faits ça n’est pas évident du tout, certaines compagnies ne proposant qu’un accès limité voire inexistant à l’inventaire de sièges primes de leurs partenaires(ou les partenaires ne leur donnant qu’un accès limité) et souvent à des tarifs prohibitifs.

Bref s’il est facile de savoir quel programme vous permet de gagner le plus il est beaucoup plus compliqué de savoir lequel vous permet de dépenser efficacement et il vous faudra faire pas mal de recherches et trainer sur des forums et sites spécialisés pour vous faire une idée.

Disons que le programme idéal vous fait gagner des miles en fonction de la distance et de la classe de voyage et pas du revenu et vous propose des billets prime à prix fixe. Mais ils sont de plus en plus rares donc il faudra faire des compromis.

Les choses à savoir pour le chasseur de statut

Si ce qui vous intéresse prioritairement est votre statut il y a une première chose à savoir. Les seuls statuts vraiment intéressants sont en général le plus élevé voire les deux plus élevés.

Tous les statuts ne valent pas la peine

Les autres vous procurent bien quelques avantages mais uniquement avec la compagnie propriétaire de votre programme de fidélité. Un statut gold ou platinum Flying Blue sera reconnu chez tous les membres de Skyteam. Un silver n’aura que certains bénéfices chez les compagnies partenaires.

Chez Miles&More de Lufthansa seul les Senator et HON Circle donnent un « Star Gold » reconnu par toutes les compagnies de l’alliance avec réciprocité des bénéfices. Avec un statut Frequent Traveller vous aurez bien accès aux comptoirs business pour vous enregistrer sur les vols opérés par des partenaires mais seulement aux salons du Lufthansa Group.

Comment gagner un statut

Donc la première chose à connaitre c’est les seuils des status : combien de points ou miles statuts sont nécessaires pour acquérir le statut convoité. Cela dépend bien sûr de chaque programme de fidélité et l’information est disponible sur les sites des programmes et compagnies.

Là encore il y a deux modèles.

  • on gagne un certain nombre de points statut en fonction de la distance et de la classe de voyage (classe de voyage, pas classe de réservation). Le monde est divisé en 3 ou zones (court, moyen, long, très long courrier par exemple) et pour chacune on gagner un nombre de miles ou point statut forfaitaire. C’est le modèle de Flying Blue.
  • on gagne des miles statut en fonction de la distance et de la classe de réservation, à l’ancienne. C’est le modèle de SAS par exemple.

Des conditions supplémentaires peuvent s’y ajouter

  • faire un certain nombre de vols avec la compagnie hôte du programme par an. Par exemple, si vous êtes membres des programmes de fidélité de Qatar Airways, Aegean et d’autres en plus de gagner le nombre de points nécessaires à l’obtention de votre statut il vous faut voler un certain nombre de fois par an avec eux.
  • dépenser un certain montant annuel avec cette compagnie. C’est le cas par exemple de Delta Skymiles (pour les résidents aux USA).

Mais à quoi bon savoir tout cela ? Je suis Allemand je vais chez Miles&More, je suis français je vais chez Flying Blue, je suis anglais je vais chez British Airways Executive Club… donc je subis mon programme.

Et bien non, c’est là l’erreur.

Il faut penser en termes d’alliances et pas de compagnie

Lorsqu’on parle d’alliances tout le monde comprend immédiatement qu’elles permettent de créditer sur le programme de fidélité d’une compagnie les miles prime et statut gagnés en voyageant avec une autre. Enfin, presque tous.

La réciprocité des statuts fonctionne dans les deux sens

On comprend aussi la logique de réciprocité : à partir d’un certain niveau de statut je bénéficie des mêmes avantages (salons, files prioritaires, franchise bagage…) sur toutes les compagnies de l’alliance (même si chaque compagnie traite toujours un peu mieux ses propres passagers élite avec des avantages exclusifs lorsqu’ils voyagent avec elle).

Mais on oublie de pousser la démarche intellectuelle jusqu’au bout : si avec un statut dans « ma compagnie » j’ai de la reconnaissance chez les autres cela veut dire que si j’ai un statut chez une autre j’aurais de la reconnaissance avec la mienne. Et si chez les autres les statuts sont plus simples à obtenir…

Il peut donc être intéressant d’adhérer au programme de fidélité d’une compagnie avec laquelle on ne voyage que peu voire pas du tout.

Là il vous faut toujours savoir quels sont les seuils, c’est normal, mais également comment chaque programme crédite les vols faits avec les compagnies partenaires.

Comment choisir le programme de fidélité d’une compagnie partenaire ?

Certains programmes créditent de manière très généreuse les vols faits avec les partenaires, d’autres comme Miles&Smile de Turkish Airlines ne créditent pas, par exemple, les vols opérés sur Lufthansa en tarifs « discount » (même s’il s’agit d’une business class).

Donc pour opérer un choix « informé » il faut travailler un peu, s’armer de patience, d’une feuille excel et d’huile de coude.

Voici comment j’ai procédé pour choisir mes programmes de fidélité sur OneWorld et Star Alliance.

1°) Essayer de reconstituer une « année type » : où je vais, avec quelles compagnies, quelles classes de réservation.

Dans mon cas je suis parti sur la base de voyages intra européens en economy discount et business discount, avec les compagnies que je pense avoir envie de prendre (et donc incluant les vols de correspondance dans le calcul), et de 2 ou 3 voyages en Asie en business class voire occasionnellement un en première (si on « chasse » le statut parfois mieux vaut un seul voyage cher en première que plusieurs moins cher en business mais qui finissent par couter près du double une fois additionner… lorsqu’une business discount vous rapporte 100% de la distance et la première 300% alors que le prix de cette dernière n’est pas 3 fois plus cher le calcul est vite fait).

2°) Trouver les classes de réservation correspondantes.

C’est la partie la plus laborieuse. Parfois l’information est disponible sur le site de la compagnie, dès fois vous la trouverez sur des forums spécialisés et des fois il faudra faire des simulations d’achat pour à un moment voir à quelle classe correspond votre billet.

3°) Trouver les seuils de chaque statut.

3°) Mettre tout cela dans une feuille excel. Les voyages dans les lignes, les programmes dans les colonnes et pour chaque itinéraire calculer combien il rapporte et le pourcentage de chaque statut que cela fait (donc si je fais ça x fois dans l’année j’ai tel statut).

4°) Utiliser l’excellent Wheretocredit pour savoir lorsque je voyage en classe X sur une compagnie combien je crédite sur chacun des programmes partenaires.

Ca n’est bien sûr qu’une simulation à grosse maille mais vous verrez parfois que selon le programme choisi, en volant de la même manière, certains programmes vous donneront facilement un statut premium et d’autres non.

Par exemple voici ce que j’avais fait à l’époque pour OneWorld. Après un certain nombre de comparatifs et en excluant certains programmes qui exigent un certain montant de dépenses ou un certain nombre de vols sur une compagnie donnée (faire 4 vols par an sur British Airways est simple, sur Qatar Airways cela peut être plus compliqué) je suis arrivé à une finale entre Finnair Plus et British Airways executive club.

Dans ce cas précis j’ai aussi ajouté la notion de statut à vie (LT).

Et le résultat fût le suivant :

Bon ça a l’air un peu compliqué comme ça mais alors qu’intuitivement tout me laissait croire que Finnair était le programme qui me permettrait d’acquérir un statut Saphire ou Emerald OneWorld le plus facilement il s’est avéré que le meilleur choix, sur la base de mes hypothèses, était BAEC. Et de loin !

Lorsque j’avais fait la même chose sur Star Alliance j’avais mis en concurrence plusieurs programmes en me disant que le meilleur choix serait peut être Miles&More ou alors un programme « mineur » genre Aegean ou TAP (mais avec des contraintes de nombre de vols). Et à la ma grande surprise le vainqueur a été un programme que j’avais failli ne même pas regarder : SAS Eurobonus.

C’est un programme qui crédite très généreusement les vols effectués avec les partenaires et offre des seuils bas.

Pour faire simple disons qu’avec mes hypothèses de voyage « standard », je faisais très facilement un gold chez SAS voire un Diamond (ce qui m’intéresse est le gold car équivalent star alliance gold sur toute l’alliance, le diamond n’est que du bonus) alors que je n’arrivais pas au Lufthansa Senator (équivalent Star Gold). On parle de seuils qui varient du simple au double. Et avec les nouvelles conditions de Miles&More cela doit même être devenu pire.

Donc si j’étais allé chez Lufthansa je n’aurais surement jamais été Star Alliance Gold, ou pas tous les ans, alors que chez SAS c’est une formalité. Et dans 5 ans je serai Gold à vie.

Et donc il y a certainement pleins de clients allemands qui ont choisi Miles&More par réflexe et ne seront jamais que Frequent Travelers alors qu’en rejoignant les programmes d’Aegean, TAP, Turkish Airlines ou SAS…

Un calcul à adapter aux habitudes de voyage de chacun : ce qui est un bon plan pour les uns ne le sera pas forcément pour les autres et inversement.

Conclusion

Choisir le programme de fidélité de sa compagnie nationale ou de celle qu’on emprunte le plus souvent n’est pas toujours le bon calcul. En fonction de vos objectifs et de vos habitudes de voyage, une compagnie partenaire peut être plus généreuse en termes de miles prime et de statut.

Image : programme de fidélité de MMXeon via Shutterstock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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