Comment choisir un bon programme de fidélité aérien ou hôtelier ?

Dans le monde du voyage les programmes de fidélité sont un outil majeur pour les compagnies aériennes et les hôtels tout autant que leurs bénéfices sont très appréciés des voyageurs fréquents.

Pour autant tous ne se valent pas, ne sont pas exécutés de la même manière et n’apportent pas les mêmes bénéfices aux clients. Voici donc un petit guide à l’usage du voyageur qui cherche à choisir sur lequel miser et du professionnel qui se demande pourquoi les clients ne sont pas fans de son programme.

Le choix d’un programme de fidélité : un luxe que tout le monde n’a pas

Commençons par le début : pourquoi comparer et benchmarker les programmes de fidélité pour choisir le bon ? Si vous vous posez la question c’est peut être justement parce que pour une raison ou une autre vous n’êtes pas concernés.

Soyons honnêtes les programmes de fidélité hôteliers ne commencent à devenir vraiment intéressants que si vous passez au moins 30 nuits à l’hôtel par an. Pour ce qui est de l’aérien, comme on l’a déjà vu, à moins de faire quelques longs courriers en business plusieurs fois par an ou d’accumuler les moyens courriers (toujours en business, l’éco ne rapporte pas grand chose à côté) vous aurez peu de chances d’atteindre un statut « intéressant » et il vous faudra 5 ans pour vous offrir un Paris-Toulouse en éco avec les miles gagnés.

Pour autant on peut avoir intérêt à être membre d’un programme de fidélité hôtelier même si on n’y a que le statut de base.  Par exemple sur Bonvoy, le programme de fidélité de Marriott, le statut de base donne quelques avantages intéressants. Il permet aussi d’avoir des réductions dans les restaurants des hôtels même si on n’y séjourne pas.

Il se peut aussi que le cadre de vos déplacements limite drastiquement le choix des programmes intéressants pour vous. Si vous ne voyagez qu’en France il est évident que c’est Le Club AccorHotels qui est le plus intéressant vu qu’on en trouve un peu partout. Allez trouver un Marriott Starwood ou un Hilton (ou marques leur appartenant) dans une ville moyenne ou petite de province, bonne chance. Ou alors vous allez vous contenter de moins de 10 villes.

Si vos déplacements vous mènent aux quatre coins de la planète là la liste est plus longue mais il peut être intéressant de regarder la « couverture » de chaque programme pour une région du monde donnée.

Ce classement des plus grands groupes hôteliers peut vous aider à imaginer les programmes ayant la meilleure couverture mondiale mais attention, certains d’entre eux sont vraiment concentrés sur une région du monde et plus faibles ailleurs.

On arbitre pas de la même manière dans l’hôtellerie et dans l’aérien

Ensuite la logique diffère un peu que vous essayiez de comparer des programmes hôteliers ou aériens.

Dans l’hôtellerie le programme de fidélité est porté par un groupe (Marriott, Hilton, AccorHotels) et est commun à toutes les marques du groupe: on gagne des points dans toutes les marques et le client profite de ses bénéfices dans toutes les marques du groupe. Vous allez donc arbitrer entre les groupes hôteliers.

Dans l’aérien les programmes de fidélité sont portés par les compagnies mais leurs bénéfices s’appliquent bien sur au niveau de la compagnie mais aussi de toutes celles qui sont membre de son alliance. Votre statut chez Air France est reconnu dans toutes les compagnies de l’alliance Skyteam (Delta, Alitalia etc), pareil pour votre statut Lufthansa chez Star Alliance (Singapore Airlines, Thaï, Swiss….).

Vous n’aurez peut être pas le choix de la compagnie sur laquelle vous allez voler le plus souvent (si vous êtes français Air France est un choix logique a priori il ne faut pas écarter Swiss, Lufthansa ou British Airways, surtout pour du long courrier) mais peut être que vous avez intérêt à choisir un autre programme que celui de la compagnie que vous empruntez. Tous ne sont pas égaux sur les efforts qu’on vous demande pour atteindre un statut intéressant et il se peut que vous ayez intérêt à créditer vos points sur une compagnie partenaire. Par exemple si le statut Gold Star Alliance vous fait rêver mais que le nombre de vols nécessaire chez Lufthansa vous donne le vertige, sachez qu’il existe d’autres compagnies dans l’alliance qui permettent d’y arriver deux fois plus vite. Mais on reparlera de cela en détail dans un futur article.

Maintenant revenons au sujet de départ : qu’est ce qui fait un un bon programme de fidélité.

Le Gain de points

Peut importe qu’on les appelle points, miles, avios ou je ne sais quoi, vous gagnez deux types de « points » quand vous volez ou séjournez dans un hôtel. Des point « prime » pour vous offrir des vols et des nuitées, des points « statut » pour acquérir un statut supérieur dans le programme. Et tous les programmes ne sont pas aussi faciles ou généreux les uns que les autres.

Pour les hôtels c’est assez simple : le plus souvent on compte les nuits pour les statuts et l’argent dépensé pour les primes. Le benchmark est assez simple pour savoir si votre programme « gagne » bien par rapport aux autres.

Dans l’aérien pour les points c’est plus compliqué et cela ressemble souvent à une usine à gaz : distance volée, classe de réservation mais aussi fait qu’on vole ou non sur une compagnie partenaire.

Par exemple, pour les « points prime », Turkish Airlines ne vous permettra pas de créditer sur son programme des vols faits dans des classes de réservation « pas cher » de Lufthansa alors que SAS crédite quasiment tout ce qu’on fait sur d’autres compagnies de l’alliance. Sur Flying Blue si vous volez avec Air France ou KLM vous gagnez des miles non en fonction de la distance volée mais en fonction du prix du billet. Mais si vous volez avec une compagnie partenaire, là vous gagnez en fonction de la distance. Autrement dit mieux vaut voyager avec les partenaires de l’alliance Skyteam ça crédite mieux.

Pour les points « statut » c’est tout aussi compliqué mais là encore un coup d’œil aux barèmes ne fait pas de mal. Par exemple si vous allez souvent aux Etat-Unis pour le travail et devez faire des vols intérieurs je ne sais quel est le bon programme mais sûrement pas Flying Blue.

Barème d’accumulation des XP sur Flying Blue, valable pour tous les vols SkyTeam ou markétés par AF/KL/A5.

Un New York-Los Angeles tout comme un Seattle Miami par exemple sont considérés comme des vols domestiques donc ne rapporteront que 2XP en Economy et 6 en business alors que vu la distance ils correspondent à des longs courriers qui devraient vous faire créditer 8 ou 24 XP selon la classe de voyage. C’est bête mais c’est comme ça.

On vous partagera bientôt la méthodo qu’on a construit (et la feuille excel qui va avec) pour faciliter ce type de benchmark.

Faites aussi attention à la durée de validité des points prime. J’ai l’habitude de dire que c’est un faux problème car si on reste 12 mois voire plus sans voyager on est pas vraiment fidèle et on ne mérite pas les avantages du programme mais c’est une chose à garder en tête.

L’utilisation des points

Gagner des points c’est bien, en profiter c’est mieux.

Pour ce qui est des points « statut » ça n’est pas compliqué de comparer les programmes : quel seuil pour quel statut et quels sont les bénéfices associés à ce statut.

Attention quand même à un détail : plus les seuils sont faciles à atteindre plus il y a de clients qui les atteignent et en général moins les bénéfices du programme sont importants.

Pour les points « prime » c’est plus compliqué. Il faut aller chercher le barème de conversion des points en vols ou nuits et voir si on ne vous paie pas avec de la monnaie de singe. S’il vous faut faire un tour du monde pour vous offrir un Paris-Nice il y a quelque chose qui ne va pas.

Attention également à quelques subtilités :

• disponibilité : les vols ou nuits « reward » sont ils possibles sur un quota de places/chambres ou sur la totalité de l’inventaire ? Pouvoir s’offrir un billet gratuit c’est bien mais si seuls quelques sièges sont disponibles pour un achat en miles sur chaque vol vous risquez de ne jamais avoir de disponibilité pour les dates de votre choix à moins de vous y prendre à l’avance.

• blackout dates : cela concerne principalement l’hôtellerie et revient à dire qu’à certaines dates un hôtel peut refuser le paiement en points.Certains programmes tolèrent les backout dates, d’autres non.

Les accès salon

Les compagnies aériennes proposent à leurs clients l’accès à des salons dans les aéroports. Certaines n’ont qu’un type de salon, d’autres plusieurs. Là encore la chose à vérifier est à partir de quel statut on a accès aux salons et auxquels. Chez Air France cela concerne les statuts Gold et Platinum alors que chez Lufthansa cela concerne tous les niveaux depuis le Frequent Traveler. Air France ne propose qu’un type de salon à ses membres (le salon La Première n’est accessible qu’aux passagers la Première indépendamment du statut), Lufthansa a un salon Business, un Senator et un First et les membre HON Circle ont accès au First.

Idem dans les hôtels. A partir de quel statut avez vous accès aux lounges des hôtels qui en disposent ? Toujours agréable d’aller prendre l’apéritif et une collation plus ou moins élaborée (cela va du snack au véritable buffet selon les cas) aux frais de la princesse.

Le Rollover

On appelle « rollover » le fait qu’un programme reporte sur l’année suivante les points statut gagnés l’année précédente en supplément de ce que vous aviez besoin pour conserver votre statut.

Par exemple sur Flying Blue le programme d’Air France le statut Gold est à 60XP par an. Si j’en ai 80 à la fin de la période de qualification je démarre l’année suivante avec un crédit de 20 !

Rares sont les programmes qui le proposent et c’est un avantage considérable pour les voyageurs fréquents. Imaginez que, le statut platinum étant à 90XP vous terminiez l’année à 120…et bien sans ce mécanisme vous allez perdre 30XP qui ne vous serviront à rien alors que vous les avez durement gagnés. Cela permet quand on a fait une bonne année de « capitaliser » pour l’année suivante si elle est moins bonne, ce qui arrive souvent avec les aléas de la vie professionnelle.

Dans l’aérien Delta propose aussi le le rollover, Hilton dans l’hôtellerie avec quelques limites.

Les surclassements

Dans l’hôtellerie le surclassement automatique ou non fait partie des bénéfices standards des bons programmes. Reste à vérifier : à partir de quel statut est on surclassé, quelle est la nature du surclassement (catégorie supérieure, meilleure chambre disponible, possibilité de surclassement en suite…) ? Là encore les choses différent énormément d’un programme à un autre.

Chez Le Club AccorHotels les clients Gold bénéficient d’un surclassement dans la meilleure chambre de la catégorie supérieure si disponible. Et les platinum ? Pas mieux.

Chez Marriott c’est pareil chez les Gold mais les niveaux au dessus ont droit non pas à la catégorie supérieure mais à la meilleure chambre disponible, suites incluses (et je peux vous garantir que c’est bien respecté).

Certains programmes proposent aussi des « Suite Night Awards » : à partir d’un certains statut vous avez le droit de demander un certain nombre de  surclassements en suite dans l’année. La différence avec les surclassements attribués à l’enregistrement c’est de pouvoir les « sécuriser » un peu en avance et parfois d’avoir une suite qui n’est pas éligible au surclassement normal.

La future version du programme de fidélité Accor, ALL (Accor Live Limitless) prévoit ce type de bénéfice. 1 Suite Night Upgrade pour les platinum (60 nuits) puis une tous les 4 000 points gagnés. Chez Marriott un Titanum Elite en a 10. Qui a dit radin ?

Dans l’aérien le surclassement ne fait pas sauf exception partie des bénéfices d’un programme de fidélité. On est surclassé par nécessité, pas par bonté (rebooking suite à un incident) ou pour libérer de la place en éco pour vendre des billets et le statut dans le programme aide à déterminer qui sera surclassé. Cela aide donc si la compagnie a besoin de surclasser mais cela n’est pas un droit ni un bénéfice ni quelque chose qui fait partie du mode opératoire normal d’une compagnie aérienne.

Exceptionnellement certaines offrent des bons de surclassements à leurs meilleurs clients. Par exemple Air France pour ses Platinum Ultimate (2 certificats de surclassement par an, cela concerne 1000 clients dans le monde) ou Lufthansa qui offre à ses membres Senator et HON Circle respectivement 2 et 6 bons de surclassement lors de l’attribution et à chaque prolongation du statut. Un peu moins radin et plus accessible.

Liftetime Status: les statuts à vie

Certains programmes vous permettent, après un certain nombre d’années de possession d’un statut, de la garder à vie, peu importe que vous continuez à séjourner/voler assez pour le maintenir.

Parfois cela ne concerne qu’un statut parfois plusieurs. Air France et son programme Flying Blue ne proposent que le Platinum à vie, Finnair pour le Gold et le Platinum, British Airways pour le Gold (son plus haut statut), SAS pour son statut Gold mais pas le Platinum (aucune importance, les deux valent un Gold Star Alliance). Dans l’hôtellerie Marriott propose le statut à vie pour tous les niveaux de Silver à Platinum.

Les modalités peuvent différer. Chez Air France on vous demandera d’avoir été Platinum 10 années consécutives. Chez Finnair et British Airways on ne vous demandera que d’avoir cumulé un certain nombre de points statuts ce qui bizarrement peut vous faire devenir Gold à vie alors que vous n’avez jamais été plus haut que Silver (mais à ce rythme ça devrait vous prendre 30 ans). Chez Marriott il faut un double cumul de nombre de nuits et d’années de possession du statut…vous pouvez avoir le bon nombre de nuits, s’il vous manque deux ans de possession de statut vous devez le maintenir deux ans de plus.

Avec le rollover et les surclassements c’est un de nos critères de choix chez TravelGuys.

« Status Sharing » : Donner un statut à un ami

Certains programmes permettent, lorsqu’on a un statut suffisant, de donner un statut à un ami. Par exemple SAS permet à un Diamond de donner un Gold à quelqu’un, et à un Gold de donner un Silver. Air France permet à ses membres Platinum de donner un platinum à quelqu’un…pourvu que le donneur ait une Amex Platinum Air France et que l’autre en prenne une….qui tire sur le même compte.

Un avantage appréciable pour les couples car il n’est jamais agréable qu’un ait accès aux files prioriataires et l’autre pas, qu’un puisse choisir son siège dans l’intégralité de la cabine et que l’autre doive attendre qu’on lui en assigne un.

Soft Landing

Et que se passe-t-il si pour une quelconque raison je n’arrive non seulement pas à conserver mon statut mais qu’en plus je n’ai quasiment pas voyagé cette année ? Jamais agréable de retomber de Platinum à rien parce qu’on a eu un problème de santé ou que le contexte professionnel a fait qu’on a moins bougé.

Certains programmes ont une politique de Soft Landing (ou atterrissage doux) : vous ne pouvez pas perdre plus d’un niveau de statut par an. Flying Blue dans l’aérien ou Marriott Bonvoy dans l’hôtellerie proposent ce bénéfice à leurs membres.

Status Match : passez d’un programme à un autre

Vous avez un statut sur un programme et désirez aller voir ailleurs ? Certains programmes proposent selon certaines conditions de donner aux clients de leurs concurrents un statut équivalent, charge à eux de le conserver. Cela permet d’éviter au client à statut les affres de redevenir un sans grade ailleurs le temps de mériter son statut. Et c’est tout bénéfice pour le programme d’accueil qui a débauché un membre hautement fidélisé et à gros potentiel sans que cela ne lui coûte beaucoup.

Je ne rentrerai pas dans les détails vu que j’ai déjà exposé le mécanisme ici.

Cartes de crédit

Nos amis américains ont de la chance : tous les programmes de fidélité proposent des cartes de crédit co-brandées avec différentes banques. La détention et l’utilisation de ces cartes permet de gagner davantage de points prime et/ou statut et de nombreux autres avantages.

Malheureusement en France très peu de choses de ce type sachant qu’on ne peut souscrire une carte co-brandée d’un programme étranger si elle n’est pas explicitement proposée sur le marché français. Donc à part l’Amex Air France et la Visa British Airways c’est le désert.

Je rappelle toutefois que la détention d’une Amex Air France permet de bénéficier du trois fois sans frais pour tous les achats faits chez Air France ou KLM. Et ça on aime !

L’exécution du programme

Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Il y a les bénéfices promis et la réalité, la manière dont le programme est exécuté.

Dans l’aérien la question ne se pose pas trop mais dans l’hôtellerie c’est un vrai sujet.

En effet c’est le groupe hôtelier qui porte le programme et les bénéfices pour les membres sont, pour faire simple, globalement supportés par les hôteliers. Et ceux-ci voient souvent comme un coût ce qui est un outil de fidélisation massif. Certaines marques ont beaucoup de mal de faire rentrer leurs hôteliers dans le rang et tenir la promesse, notamment quand ce sont des franchisés.

Historiquement cela a toujours été une des faiblesse d’AccorHotels qui ne sait pas se faire respecter de beaucoup de ses hôteliers. A l’inverse Starwood était un des élèves modèles de la classe mais depuis son rachat par Marriott cela semble se gripper un peu : pas tant au niveau des ex Starwood mais plutôt des ex-Marriott qui trainent un peu la patte pour délivrer aux clients des bénéfices supérieurs à ce qu’ils étaient avant, le nouveau programme Marriott Bonvoy étant en effet largement inspiré de feu SPG de Starwood.

Là pas de recette miracle pour vous informer….à part poser la question aux autres clients et fréquenter les forums de voyageurs fréquents.

 

Bon, il y a pleins de choses à dire sur le sujet mais voilà qui devrait vous permettre de savoir si tel ou tel programme vous délivre vraiment la valeur que vous attendez.

Photo : Programme de fidélité De kenary820via Shutterstock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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