Pendant ce temps, chez Air France, ça rabote

Alors que certaines compagnies aériennes françaises ont connu un été plus que chaotique, il semble que chez Air France on prenne la chose suffisamment au sérieux pour commencer à se préparer à des lendemains qui déchantent.

Les premiers signes sont venus de Flying Blue.

Flying blue : « Deceiving by nature » ?

On n’est plus à une radinerie près dans le programme qui se voulait « Generous By Nature » il y a un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre.

La semaine dernière il a en effet été annoncé que désormais les membres silver ne pourraient plus acheter de billets en classe La Première avec leurs miles, cette possibilité n’étant plus offerte qu’aux Gold et Platinum. Par ailleurs le montant de la prime a acquitter pour cet achat va augmenter.

Par contre le montant de la prime pour se surclasser en La Première, lui, ne change pas.

Je comprend la volonté de « raréfier » un produit auquel on veut donner une image exclusive et premium. Il n’empêche que la cabine installée sur les A380 et qui constitue la majorité de l’inventaire est totalement indigne et qu’aux dernières nouvelles on constatait de manière générale une dégradation de la prestation en vol peu importe l’appareil. Le produit sur 777 est beau, l‘expérience au sol est peut être la meilleure au monde, mais il faudrait faire attention à ne pas se voir plus beau que l’on est.

A côté de cela a été annoncée la fin du Petroleum Club, « sous programme » réservé aux voyageurs du secteur de l’énergie. Il n’était plus possible d’y adhérer depuis 2019 donc il n’est finalement pas surprenant d’apprendre qu‘il disparaitra en 2021. Je ne pense pas que cela changera grand chose : le réseau spécifique à ces voyageurs reste et s’agissant pour la plupart de voyageurs fréquents je pense qu’ils sont tous capables d’avoir un statut Flying Blue sans passer par ce « fast track ».

Mais quand on taille dans les « niches » cela veut toujours dire quelque chose.

Densification en vue sur le long courrier

Une info venue du sérieux et crédible Air Transport World. Sensible à la menace des low cost long courrier, Air France chercherait à « densifier confortablement » sa classe économique long courrier.

Une décision qui apparemment ne concerne que les A350 et B787 en commande, pas les avions déjà en service. Cela signifierait donc que KLM est également concernée vu qu’il n’y a plus de 787 en attente de livraison chez Air France depuis la décision de rationaliser la flotte.

Au moins on a de l’humour chez Air France car densifier une cabine (mettre plus de monde dans le même espace) n’a jamais mais vraiment jamais été synonyme de confort pour les passagers !

Comment densifie-t-on une cabine ?

1°) En enlevant des sièges « business » pour mettre davantage de siège éco. Impensable alors que Ben Smith entend au contraire repositionner Air France sur le segment Premium.

2°) En rabotant sur les Galley, espaces de travail des personnels navigants, toilettes etc à coup de quelques centimètres ici et là. En plus de dégrader les conditions de travail du personnel (et donc le service client in fine) on ne peut pas imaginer que cela ne soulève pas une grogne des personnels concernés qui comme le plus souvent chez Air France finirait en préavis de grève. Déjà qu’on leur demande désormais de procéder au tri sélectif à bord !

3°) En réduisant l’espace pour les jambes et/ou installant des sièges plus fins afin d’ajouter quelques rangées de sièges.

4°) En ajoutant un siège dans la largeur donc en diminuant la largeur des sièges.

Aujourd’hui les 787 d’Air France on des rangées de 9 sièges en classe économique, de même pour les (enfin le à ce jour) 350. Pour mémoire le 777 a des rangées de 10 mais est plus large.

On est aussi à 9 sur les A350 de Lufthansa, Emirates ou les 787 d’American Airlines.

Pour autant Airbus semble « pousser » les compagnies, en tout cas les low cost, à adopter une configuration à 10 sièges sur leurs A350.

Mais peu importe l’option choisie, on peut être sûr que les passagers ne diront pas merci.

La vraie raison est elle la crainte des low cost long courrier ?

Pour beaucoup de médias US qui ont commenté le sujet la cause de ce questionnement sur la densification du long courrier (je parle de questionnement car rien n’est décidé, on n’est que dans l’exploratoire) est la peur des low cost long courrier qui ont entrainé la disparition d’Aigle Azur et XL Airways dernièrement.

Cela ne tient pas debout.

XL Airways était une low cost long courrier, Aigle Azur un peu moins mais en faisait. Level n’a pas fait les preuves de sa rentabilité, Norwegian inquiète, Après un revirement de sa compagnie mère (Lufthansa) Eurowings va se lancer sur le créneau mais sans grande garanties. Qu’on soit clair : aujourd’hui ce sont les low cost long courrier qui ont du mal et le modèle n’a toujours pas fait ses preuves. Aucune raison, pour moi, de faire ainsi paniquer Air France.

Je mentionnais plus haut la volonté de repositionner Air France clairement sur le premium ce qui semblerait incompatible avec une telle option. Quoique. Une option qui consisterait à « mettre le paquet » sur les classes avant tout en densifiant l’arrière sans toutefois tomber dans les extrêmes permettrait à la fois de séduire une clientèle à haute contribution devant et renforcer la rentabilité derrière. Pourquoi pas tant que c’est assumé.

Pour moi la raison est moins exogène qu’endogène. Air France doit, effectivement, se renforcer dans le premium mais également, et cela n’est pas négociable, améliorer ses marges si elle ne veut pas se retrouver en mauvaise posture prochainement.

De plus, les capacités « perdues » avec le retrait programmé de l’A380 ne seront visiblement pas compensées à terme. Moins d’appareils mais plus de places ? C’est une logique qui tient la route.

Entre deux directions a priori opposées, la solution ne passera que par l’art du grand écart. Mais il ne faudrait pas oublier que la compagnie paie encore aujourd’hui le prix de la politique de densification insufflée par Bruno Matheu en son temps et on espère qu’ils ont appris du passé.

En attendant ça rabote, ça rabote dans tous les sens.

Photo : B777 Air France De Rebius via Shutterstock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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