Le secteur aérien européen est en pleine phase de consolidation et les mois qui viennent devraient voir plusieurs rachats se finaliser, certains attendus, d’autres moins. Une dynamique portée par les trois majors du secteur à savoir IAG, Lufthansa Group, et Air-France-KLM
Mais à ce stade le moins qu’on puisse dire est que la plus grande confusion règne.
Dans cet article :
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- L’inévitable consolidation du ciel européen
- IAG et Air Europa : c’est long mais ça se fera
- ITA rejoint Air France-KLM à moins que…
- La bataille pour TAP commence
- IAG regarde easyJet et…TAP
- Toutes les compagnies sont à vendre
- Conclusion
L’inévitable consolidation du ciel européen
Contrairement aux USA où 3 majors dominent le ciel suite à un mouvement de consolidation, à savoir Delta Airlines, American Airlines et United et où on peut penser que la situation est stabilisée au moins pour un temps, tout reste à faire côté Européen.
En effet si la fusion d’Air France et KLM a donné Air France-KLM, si le Lufthansa Group a grossi par la reprise de Swiss, Austrian et Brussels Airlines en difficulté, et si British Airways et Iberia ont donné naissance à IAG, il reste sur le marché beaucoup de compagnies de taille intermédiaire attaquées par les low cost par le bas et pas assez grandes pour s’en sortir par le haut en allant sur le terrain des majors.
Plus généralement parlant avec une pression à la baisse sur les prix et un marché qui n’a pas une croissance infinie, il allait y avoir des morts.
Ce mouvement semblait inéluctable avant même le COVID. A l’époque Carsten Spohr, CEO de Lufthansa disait d’ailleurs qu’il ne resterait que 12 compagnies majeures dans le monde, 3 par continent, et d’ailleurs Lufthansa Group se lançait dans une politique visant à accroitre ses marges afin de financer d’éventuelles acquisitions.
De son côté Air France-KLM annonçait fin 2019 vouloir participer à la consolidation du secteur.
Le COVID a mis un coup d’arrêt à cette dynamique mais l’échéance n’était que repoussée. Bien sûr le contexte est différent avec des coûts et des prix à la hausse mais les les données de base n’ont pas changé voire se sont accentuées. Les majors sont sorties en plutôt bon état de la crise alors que pour les autres le retour aux bénéfices se fait attendre et elles en sont ressorties encore plus fragilisées comparativement.
Le contexte n’a donc jamais été aussi favorable aux rachats.
IAG et Air Europa : c’est long mais ça se fera
Fin 2019 nous annoncions le rachat d’Air Europa par IAG. Depuis le COVID a repoussé la finalisation de l’opération, on la croyait même abandonnée lorsque le groupe a payé un dédit à la compagnie espagnole.
Finalement IAG a annoncé que le rachat allait se faire mais qu’il prendrait du temps, le dédit étant converti en apport.
ITA rejoint Air France-KLM à moins que…
Le rachat d’Air Italia puis de ITA a été un feuilleton qui nous a occupé depuis 2017. Une foule de projets de reprise impliquant tour à tour Air France-KLM, Lufthansa, Delta ou encore easyJet ont été présentés puis retirés, amendés, refusés jusqu’au dépôt de bilan de la compagnie historique italienne ressuscitée sous le nom d’ITA.
Finalement c’est Air France-KLM qui l’a emporté. Enfin presque.
Presque parce le groupe franco-néerlandais fait partie d’un consortium mené par le fonds d’investissement Certares Management et ne compte pas investir dans ITA pour l’instant. La raison ? Le groupe n’a pas remboursé ses aides d’Etat liées au COVID et les autorités européennes lui interdisent de prendre plus de 10% du capital d’une autre compagnie pour l’instant. Dans l’état actuel des choses la relation entre Air France-KLM et ITA ne sera que commerciale.
Ensuite parce le consortium a été choisi pour rentrer dans une phase de négociation exclusives pour une durée limitée, durée qui vient d’arriver à son terme. On ne sait que penser à ce stade.
Est-ce que le nouveau gouvernement italien a décidé de ne plus se séparer d’ITA ? C’était un risque envisagé depuis le début.
Est-ce qu’il a décidé de faire machine arrière et décidé d’accepter l’offre de Lufthansa, mieux disante même si elle donnera à l’Etat Italien un poids moindre au sein de la compagnie. ?
Est-ce un simple contre temps ?
On verra bien même si on pense que les concessions faites en termes de gouvernance faisaient de ce rachat une opération très risquée.
La bataille pour TAP commence
Nous vous annoncions il y a peu que TAP était à vendre et qu’encore une fois on allait assister à une bataille entre Air France-KLM et Lufthansa.
Lufthansa fait figure de favori logique, TAP étant membre de Star Alliance mais on a vu sur le dossier ITA que la rationalité ne prévalait pas toujours.
Et puis on se demande quelle est la stratégie d’Air France-KLM sur le sujet. Le groupe ne pourra pas prendre plus de 10% du capital sauf, encore une fois, à s’adosser à des partenaires qui porteraient l’essentiel de l’offre. Il a également été dit qu’une participation de moins de 10% serait envisagée mais quel intérêt dans une compagnie membre d’une alliance concurrente ? On voit mal un partenaire historique de Lufthansa faire du codeshare avec une compagnie Skyteam…
A moins qu’un troisième larron ne mette tout le monde d’accord ?
IAG regarde easyJet et…TAP
Ce troisième larron pourrait être IAG (British Airways, Iberia, Vueling, Aer Lingus…) qui s’est dit prêt à participer à la consolidation du marché. Et il regarde TAP avec intérêt qui lui donnerait une position quasi-monopolistique sur la péninsule ibérique.
Mais IAG regarde également du côté d’easyJet, pas tellement en forme en ce moment et dont les résultats peinent à redevenir positifs, avec une valorisation en forte baisse. Un choix qui aurait du sens : ça n’est pas la première fois qu’on dit qu’easyJet est un partenaire idéal pour alimenter les hubs des majors et, en plus, la compagnie opère de nombreuses lignes intra-européennes.
Toutes les compagnies sont à vendre
Pour continuer le tour des opportunités disons que pour être honnête toutes les compagnies européennes de taille moyenne sont potentiellement à vendre pour peu qu’une major y mette le prix. Certaines sont dans un état plus fragile que d’autres, pour certaines le choix est acté et d’autres non mais potentiellement tout peut arriver.
De SAS à Croatia Airlines en passant par les Czech Airlines, Tarom et autres LOT les possibilités ne manquent pas et ce qui est improbable aujourd’hui peut se passer demain.
Ensuite l’histoire prouve que les logiques d’alliances prévalent souvent dans ce type d’opération, ce qui semble jouer dans le sens de Lufthansa vu l’omniprésence de Star Alliance sur le continent.
Autre facteur à prendre en compte : Lufthansa est moins endettée que ses concurrentes et Air France-KLM doit toujours non seulement rembourser ses aides COVID mais également se recapitaliser avant d’avoir des ambitions plus affirmée.
Conclusion
IAG, Lufthansa Group et Air-France KLM sont prêtes à mener la consolidation du ciel européen. Mais aujourd’hui elles n’ont pas toutes la même capacité d’investissement et seules deux opportunités existent officiellement.
Image : avions à l’aéroport de Ekaterina Pokrovsky via shutterstock