Qui sont les perdants de la nouvelle politique d’accès aux salons de Star Alliance ?

Star Alliance vient de revoir sa politique d’accès aux salons pour les clients de ses compagnies membres et cela semble-t-il fait grincer pas mal de dents. A tort ou à raison ?

Qu’est ce qui donne accès à un salon ?

Avant d’aller plus loin, rappelons quelques règles évidentes dont la compréhension aidera à y voir plus tard dans ce qui suit.

A qui les compagnies aériennes permettent elles de profiter d’un salon avant (voire après) un vol. Sans vouloir rentrer dans des détails trop complexes cela dépend de deux facteurs principalement : la classe de voyage du client et son statut dans le programme de fidélité de la compagnie ou d’une compagnie membre.

Typiquement je suis platinum sur Flying Blue, cela me donne accès par exemple à un salon Korean entre Séoul et Shangai…même si je le fais sur China Eastern car les 3 compagnies sont membres d’une même alliance.

Et quand je vole en business sur une compagnie, peu importe mon statut, j’ai droit à cet accès…pourvu qu’un salon existe.

Après certaines compagnies comme Lufthansa ou Turkish Airlines proposent des salons différenciés selon qu’on soit passager business ou qu’on ait un statut Star Alliance Gold chez une compagnie partenaire mais ici cela importe peu.

Salon de compagnie ou « countract lounge » ?

Dans tous les grands aéroports les grandes compagnies ont un salon en propre ou envoient leurs clients dans le salon d’une compagnie partenaire qui y a une plus grande présence ou encore c’est carrément l’alliance qui met à disposition un salon à toutes ses compagnies membres comme par exemple Skyteam à Istanbul.

Mais parfois elles n’ont pas cette capacité, souvent dans des aéroports de « second rang » où ça n’est pas rentable pour elles ou parce choisissent de proposer à leurs clients un salon autre que celui de leurs partenaires. Dans ce cas elles utilisent un « contract lounge ». Ce sont des salons détenus par des sociétés dont c’est le métier et qui proposent des accès payants à leurs salon, peu importe la classe de voyage ou le statut sur un programme de fidélité. Dans ces cas là la compagnie paie pour chaque client qu’elle y envoie.

Typiquement l’excellent Business Lounge de l’aéroport de Tallinn, utilisé par toutes les compagnies qui desservent l’aéroport car vu la taille de ce dernier avoir un salon « en propre » serait un non sens, est un « contract lounge ». J’y avais accès à deux titres : d’abord parce que je voyageais en business sur Lufthansa et ensuite en raison de mon statut sur le programme Eurobonus de SAS. Ca c’est important pour la suite.

Quand United donne un coup de canif dans le contrat de mariage

Les conditions de Star Alliance sur les « Contract Lounge » étaient assez claires pour les membres Star Alliance Gold.

Contract Lounges

At airports where neither a Star Alliance branded lounge nor a Star Alliance member carrier offers a lounge, third party lounges are contracted by some of our member airlines. As a Star Alliance Gold customer travelling on a Star Alliance member airlines operated flight from such airports, you have access to these third party contract lounges, if the member airline you are travelling on has a contract with this lounge.

Mais d’un seul coup United décida de ne plus appliquer cette disposition et décida que lorsqu’elle utilisait un « contract lounge » elle n’y autoriserait plus, dans certains aéroports, l’accès aux membres des partenaires ayant le fameux statut mais ne voyageant pas en business. Si dans les aéroports en question une autre compagnie Star Alliance dispose d’un salon alors les passagers en question ont un refuge, sinon les voilà SDF.

Comment l’alliance pouvait-elle tolérer un tel manquement d’une compagnie membre à ses obligations ? Et bien en baissant son pantalon !

Quand Star Alliance plie face à United

L’alliance a-t-elle tenté de faire rentrer United dans le rang ? On ne le saura jamais. Par contre elle ne pouvait laisser la compagnie américaine « hors la loi » sans perdre de sa crédibilité et plutôt que se fâcher avec son plus gros membre (mais pas le meilleur….) elle simplement adapté ses politiques d’accès au salon. Vous remarquerez l’art de la nuance.

Contract Lounges

At airports where neither a Star Alliance branded lounge nor a Star Alliance member carrier offers a lounge, third party lounges are contracted by some of our member airlines. As a Star Alliance Gold customer travelling on a Star Alliance member airlines operated flight from such airports, you may have access to these third party contract lounges. Please refer to the Lounge Finder to identify which lounges you may have access to, according to the policy of each airline*.

*Check the current policy of the airline with which you are travelling.

Pour revenir à un de mes exemples précédents. Aujourd’hui si je refais mon Tallinn-Francfort en Business sur Lufthansa j’aurais encore accès au salon. Si je suis en éco, par contre, la compagnie allemande aurait le droit de me refuser l’accès bien que je sois Star Alliance Gold.

Une tempête dans un verre d’eau ?

Autant vous dire que l’affaire a fait grand bruit notamment outre Atlantique, United se faisant reprocher sa mesquinerie et Star Alliance son manque de courage. Bref, la valeur perçue de l’alliance vient quand même d’en prendre un sacré coup.

Pour autant, est-ce la fin du monde ?

Sans vouloir donner de leçons d’anglais il y a une différence entre « may » et « won’t ». Cela permet de légaliser la position d’United sans (trop) dévaluer la valeur du statut.

La vraie question est de savoir si d’autres lui emboiteront le pas ? Je ne pense pas, sauf pour s’en servir de manière occasionnelle pour réguler la surpopulation de certains salons dont je me plaignais d’ailleurs la semaine dernière. Et ce d’autant plus que souvent les « contract lounges » sont des salons de taille moyenne voire petite, partagés par plusieurs compagnies, accessibles de manière payante à tout un chacun donc, effectivement, ils peuvent parfois être bondés. Et vu que la compagnie paie pour les utiliser elle peut, en faisant comme United, réguler l’occupation, baisser ses dépenses et mieux satisfaire ceux qui ont payé leur billet au prix fort, soient ils passagers occasionnels et au détriment de clients fidèles.

Je ne vois justement pas Lufthansa, Swiss, ou encore Singapore Airlines jouer au même jeu car ce qui joue contre United c’est aussi sa taille qui lui fait cumuler, à mon avis, beaucoup plus de « contract lounges » que ses partenaires.

Bref l’avenir nous dira si on a globalement perdu au change mais si on peut comprendre qu’une compagnie ou une alliance veuillent lutter contre une surpopulation dans certains clients qui nuit à l’expérience client, on peut regretter la faiblesse de Star Alliance sur le sujet. Aurait elle ainsi battu en retraite devant SAS ou Aegean ? Je suis prêt à parier que non.

[Update] : Précision utile apportée par un de nos lecteurs.

Photo : ©TravelGuys – Tous droits réservés – Pas d’utilisation sans notre accord.

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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