IATA Travel Pass : vous ne voyagerez plus sans lui !

On ne sait pas encore s’il faudra impérativement être vacciné contre le COVID pour voyager mais les choses se mettent en place pour contrôler les vaccins des voyageurs, peu importe que cela devienne obligatoire ou non.

Le vaccin, préalable au redémarrage

Une chose est certaine : le vaccin est la condition sine qua non d’un début de retour à la normale. Retour à la normale en général mais surtout retour à la normale pour le secteur du voyage qui fait face à un double enjeu :

  • Restaurer la confiance des voyageurs afin qu’ils se déplacent à nouveau, confiance dans les moyens de transport comme confiance dans les conditions sanitaires de leur lieu de destination.
  • Restaurer la confiance des destinations dans les voyageurs afin qu’elles suspendent les barrières à l’entrée et fassent redémarrer les secteurs (hôtellerie, restauration, centres de congrès, musées…) qui motivent les voyages.

Obligatoire ou non tout le monde a intérêt à une vaccination large de la population mais le sujet est tellement critique qu’il est hors de sujet de jouer avec le feu.

La nécessité d’un système de confiance

Vu la criticité du sujet personne ne se satisfera d’une demi-mesure et d’auto-attestations sur l’honneur. C’est d’un système universel et qui ne soit sujet à aucune caution dont les gouvernements et les acteurs du secteur ont besoin.

La pire des choses qui pouvait arriver était justement que chacun crée son système de contrôle de la vaccination dans son coin. Cela n’aurait pour effet que poser des questions :

  • Les systèmes de complaisance avec des acteurs économiques ou gouvernementaux qui se seraient montré moins regardants que d’autres pour pousser à la réouverture des frontières et des activités.
  • Le risque de falsification des certificats de vaccination par les voyageurs.
  • Le traffic de faux certificats.
  • La reconnaissance des certificats de vaccination à l’étranger : que vaut une attestation d’un médecin français lors d’un contrôle d’entrée sur le territoire chinois et vice versa. Authenticité, sérieux, certification du vaccin utilisé, sans parler des problèmes de langue qui n’ont pas été sans poser des problèmes pour les tests PCR.
  • Confidentialité des données de santé donc sensibles mises entre les mains d’acteurs économiques privés ou d’acteurs publics qui pourraient les détourner de leur finalité.
  • Reconnaissance des dispositifs de contrôle d’un pays à un autre.

Pour dire les choses clairement il y avait deux exemples à éviter : la confiscation de la certification de la vaccination par les acteurs privés (aérien) dans des dispositifs disparates d’un côté et la multiplication de dispositifs nationaux plus au moins bancals à l’image du triste TousAntiCovid français.

L’IATA prend les choses en main

Il y a donc ici une responsabilité multipartite entre les laboratoires qui effectuent les tests, les Etats qui vérifient leur véracité et les compagnies aériennes qui doivent valider leur authenticité ainsi que l’identité de la personne qui voyage.

A cela s’ajoute la nécessité de préserver la confidentialité des données tout en rendant le contrôle possible par ceux qui en ont la charge, ce qui n’est pas sans rappeler la mise en place du passeport biométrique.

Afin de pallier à un inévitable attentisme des gouvernements face à la difficulté d’élaborer une solution collective c’est l’IATA ( International Air Transport Association) qui s’est lancée dès cet automne dans l’élaboration d’un passeport numérique de sorte que les états n’auraient plus qu’à acter son existence. Il s’agit du IATA Travel Pass.

Qu’est ce que le IATA Travel Pass

Le IATA Travel Pass est une solution composée de 4 modules qui couvrent le parcours du voyageur de bout en bout.

La collecte des prérequis pour rentrer dans un pays pour informer le passager et donner les critères d’acceptation aux compagnies en s’appuyant sur Timatic qui est déjà la base faisant foi aujourd’hui.

Liste les laboratoires autorisés pour que le passager pratique un test ou se fasse vacciner.

• Le Lab App pour que les laboratoires certifiés enregistrent les certificats de vaccination d’un passager.

• L’application de voyage sans contact qui permet au passager de voyager en fournissant aux autorités toutes les informations requises.

Une première avec Singapore Airlines

La première compagnie a expérimenter le Travel Pass sera Singapore Airlines au départ de Kuala Lumpur ou Jakarta vers Singapour avant une extension au reste du réseau.

Nul doute que d’autres annonces dans ce sens devraient rapidement arriver et que l’utilisation de Travel Pass se généralise dans les 6 mois à venir.

Mais pour que Travel Pass soit un succès il reste encore des points à régler.

Des questions pratiques toujours en suspens

On se félicitera que l’application repose sur des briques open source et puisse se déployer rapidement de manière décentralisée, à l’inverse d’une solution propriétaire qui aurait été trop lourde.

Les sceptiques regretteront que ce soit l’IATA, une association commerciale, qui ait pris l’initiative et pas une une structure « non mercantile » comme l’OACI (Organisation de l’aviation civile internationale) qui est une émanation de l’ONU. Mais dans le contexte il était urgent de ne pas attendre et si c’était pour vivre un énième épisode de mésentente internationale et de retards bureaucratique on ne s’en plaindra pas.

Quid de la sécurité des données ? On attend encore des précisions de ce côté.

Et, surtout, quid du mécanisme qui permettra aux laboratoires de charger les preuves de vaccination dans le système ? Si le dispositif est long à se déployer ou ne concerne qu’une fraction d’entre eux le dispositif sera inutile. Et d’ailleurs, quels seront les critères qui amèneront à les certifier ?

Toujours au niveau du chargement des preuves de vaccination quel sera la lourdeur du dispositif pour ceux qui vaccineront ? Sera-t-il facile de mise en œuvre ?

Car la question est bel et bien là : savoir si demain le médecin de ville qui vaccinera les français pourra facilement renseigner Travel Pass ou si nombre d’acteurs seront exclus du dispositif.

Et on ne parle même pas de la régularisation a posteriori des personnes qui auront été vaccinée avant le déploiement du dispositif qui ne s’annonce pas comme une partie de plaisir et sent bon le chaos administratif.

Bref, les outils de la reprise se mettent en place mais on attend encore de savoir comment ils vont fonctionner à grande échelle. En attendant si le vaccin ne devient pas une obligation en droit il risque bien de devenir un standard de fait.

Image : Passeport pour le voyage de REDPIXEL.PL via Shutterstock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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