RIP Joon

Alors que l’on annonce la mort de Joon depuis un certain temps, des informations concordantes semblent bien confirmer que Ben Smith a bel et bien décidé de mettre un point final à l’initiative de « voyage nouvelle génération par Air France » puisque c’est ainsi que la compagnie se présentait à ses clients. L’occasion pour TravelGuys de revenir sur les raisons d’un échec que nous avions annoncé.

Joon est rentable. Et c’est tout.

Précisions bien une chose : si Joon est un échec ça n’est pas un échec financier et c’est déjà ça. Après un an d’activité la compagnie était rentable, une rentabilité obtenue au prix de conditions de travail et d’embauches dures pour les stewarts et les hôtesses, les pilotes n’ayant pas lâché de concession dans l’histoire. Au moins il n’y aura pas de note à solder même si rétrospectivement on regrettera les coûts de marketing et de mise au couleurs des avions dont on aurait donc finalement pu se passer.

Si Joon n’est pas un échec en tant que tel la compagnie était par contre un fardeau pour la marque Air France

Joon : une idée qui fait mal à la marque Air France

Le problème de Joon était avant tout marketing : la « nébuleuse » Air France est illisible pour le client avec la multiplication des marques ces dernières années. Ben Smith a clairement décidé de repositionner Air France sur le premium et les clients dits « haute contribution » et Joon faisait un peu tâche dans le paysage car c’était un produit que le client subissait plus qu’il ne le choisissait.

Concrètement parlant le client a le choix de voler premium ou low-cost (même si Joon était plus une hybride qu’une low cost). De voler sur Air France ou sur Transavia sur les destinations opérées par les deux compagnies ou alors sur une low-cost concurrente. Le problème de Joon était qu’il s’agissait d’un produit dégradé imposé au client. Cette étude de Flight-Report le montre très bien :le client ne refuse pas le low cost mais il refuse qu’une compagnie premium ne lui laisse pas le choix. D’où la faiblesse de la note de Joon qui propose pourtant un meilleur « hard product » que nombre de compagnies classées devant elles.

Par contre le flou du positionnement ni low-cost ni premium, le concept vaseux de compagnie pour « millenials » (sûr que Téhéran et les Seychelles sont des destinations de millenials…) faisait que la promesse n’était pas claire sur le produit et qu’à la fin on ne pouvait être que déçus

Non que l’offre BOB (buy on board) ait été de mauvaise qualité mais que l’idée même du BOB avec des billets dont le prix était similaire à du « vrai » Air France ne passait pas chez les clients. Le deuxième pilier de la rentabilité de Joon avait donc du plomb dans l’aile. (Notez que les plats achetés à bord n’étaient pas facturés par Joon mais…..Servair Joon).

Et pour avoir également testé la prestation en business moyen courrier nous ne pouvons que dire qu’elle était pour le moins légère et ne valait pas le prix du billet.

Ce qu’il faut garder de Joon ? Les équipages !

Joon n’est que l’échec d’une tentative de low-costisation tiède de l’ensemble du moyen courrier Air France qui ne disait pas son nom. Ni les clients qui regrettaient l’absence de service ni les personnels Air France qui voyaient peu à peu leur réseau phagocyté par une cousine aux prestations dégradées ne la regretteront.

Pour autant tout n’est pas noir et chez Travelguys nous avons toujours unanimement salué l’attitude et la serviabilité des PNC Joon qui faisaient souffler un vent de fraicheur dans les cabines, loin du comportement blasé voire aigri qu’on observe encore trop souvent dans la maison mère. En espérant juste qu’en quittant polos et Stan Smith pour un uniforme plus conventionnel ils ne perdent cette fraicheur et cette envie de bien faire.

Retour à la case départ

Retour donc à la case départ avec encore une fois l’inextricabilité du problème de rentabilité d’Air France. Il va falloir réembaucher les PNC chez Air France…aux salaires Air France donc trouver d’autres variables de rentabilité. Quand on regard les prix pratiqués au départ de Paris par la concurrence (et notamment Lufthansa), l’augmentation des prix n’est pas une option envisageable non plus à moins d’une évolution notable du produit dont la montée en gamme avait pris du plomb dans l’aile après le départ d’Alexandre de Juniac.

Mais comme Ben Smith à l’air de marcher sur l’eau depuis son arrivée on a envie d’y croire.

Photo : Shutterstock.com

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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