Marriott fait un pied de nez à ses meilleurs clients : le statut ambassador dégradé !

Alors que Marriott annonçait la semaine dernière de belles initiatives pour faciliter l’acquisition / conservation de statuts sur son programme de fidélité Marriott Bonvoy, le groupe hôtelier semble reprendre d’une main ce qu’il a donné de l’autre à certains de ses meilleurs clients.

Les membres « ambassador » du programme vont ainsi perdre ce qui faisait toute la valeur de ce statut.

Qu’est ce que le statut « Ambassador » chez Marriott.

Le statut « Ambassador » est le plus élevé chez Marriott. Il arrive après Silver, Gold, Platinum et Titanium. A la liste déjà conséquente des bénéfices liés au statut Titanium il en ajoute quelques uns comme le « Your24 » (la possibilité de garder sa chambre vraiment 24h c’est à dire par exemple si vous arrivez à 22h vous pouvez la gardez jusque 22h le lendemain) et, surtout, le fameux service Ambassador.

Le service Ambassador est un interlocuteur dédié (l’ambassador) chez Marriott pour régler tout type de problème, une sorte de « concierge personnel ».

Le client peut lui faire suivre des demandes spéciales (s’assurer que surclassement aura bien lui, demander un surclassement particulier, informer qu’un voyage concerne un mariage, un anniversaire, demander une prestation …), régler d’éventuels différends, et en tout cas faciliter le dialogue entre le client et les hôtels.

Le client disposant du service « ambassador » n’a pas juste un numéro ou un email où contacter un ambassador. Il a les coordonnées de son ambassador qui lui est personnellement affecté afin de lui permettre de mieux le connaitre dans la durée, mieux le comprendre, voire mieux anticiper ses demandes.

Le statut ambassador : 100 nuits + $20 000 dollars !

Bien sur un tel statut ne s’acquiert pas facilement. Pour l’obtenir il faut séjourner 100 nuits dans un hôtel du groupe Marriott sur une année civile mais pas uniquement. Il faut également avoir dépensé $20 000 pendant ces séjours (ce qui fait une moyenne de $200 par nuit en incluant la nuit, les dépenses au bar, restaurant, spa…).

De manière exceptionnelle, comme évoqué plus haut, vu le contexte particulier du moment, en 2021 $14 000 seront « suffisants » pour obtenir le statut Ambassador.

L’ambassador : la seule chose qui coûte cher dans le statut

Contrairement à l’aérien, beaucoup de bénéfices des programmes de fidélité hôteliers ne coûtent pas grand chose à l’hôtelier.

Surclasser un client dans un chambre qui n’a va pas été vendue ne coute rien et fait plaisir. Accorder un départ tardif également si jamais la chambre n’est pas reprise par un autre client avant une certaine heure. En fait, en dehors d’éventuels accès lounge, la plupart des avantages consistent à faire profiter le client de « capacités non vendues ».

Par contre le service ambassador a un coût : celui de salariés que l’on recrute et qu’on paie pour prendre soin des clients. Payer des gens pour être à disposition de clients qui les appelleront beaucoup ou pas du tout est un des bénéfice les plus appréciés pour les clients mais son coût pour le programme de fidélité est également le plus lourd et ce sont en plus des frais fixes.

Les ambassadors : premières victimes du COVID

Pendant la pandémie Marriott a licencié progressivement puis massivement nombre de ses ambassadors. Peut on lui en vouloir ? Alors que la plupart des hôtels étaient fermés et les clients interdits de voyager payer des salariés pour répondre à des clients à distance n’avait plus vraiment de sens.

Mais alors que tout le monde s’attendait à ce que les choses reviennent un jour à la normale, Marriott vient d’envoyer un message qui douche les attentes de ses membres Ambassador.

Désormais ils ne doivent plus s’attendre à disposer d’un « concierge personnel » et il leur est demandé de ne plus chercher à leur écrire personnellement : les adresses email des ambassadors encore en poste seront d’ailleurs désactivées.

A la place les clients ambassador disposeront d’une adresse email générique à contacter et leurs demandes seront traitées par « une personne » mais plus « une personne qui leur est dédiée ».

La fin des ambassadors : grosse dégradation du programme Marriott Bonvoy ?

Beaucoup de clients s’émeuvent donc de cette annonce, mais sont ils vraiment si perdants que cela ?

Après tout le service ne disparait pas, il est juste assuré par une équipe dédiée qui traitera les demandes des membres et non plus par une personne dédiée à chaque membre ?

Après tout c’était déjà un peu le cas avant. En effet si le client avait « son » ambassador dédié, l’ambassador, lui, était bien sûr dédié à plusieurs clients. Avec la fusion des programmes provoquée par le rachat de Starwood par Marriott le nombre de clients à 100 nuits et plus a mécaniquement augmenté et beaucoup d’ambassadors se sont retrouvés à gérer tellement de membres que le service n’était plus au niveau de qualité que ces derniers attendaient.

Avec la crise on peut s’attendre à ce que le nombre de membres Ambassador décline fortement, même si les dernières offres promotionnelles mises en place font tout pour limiter ces déclassements. Mais le nombre de personnes dédiées chute encore plus rapidement on peut s’inquiéter pour la qualité de service. Tout est question de savoir trouver le « bon » ratio.

Mais comme souvent dans le monde du service « perception is reality ». Même si on fait le pari que la qualité de service fournie par les équipes dédiées aux membres Ambassador ne chute pas, voire augmentera si le ratio « membres/agents » » s’améliore, ce que voient les membres est qu’ils n’auront plus d’ambassador dédié et qu’ils seront gérés par une sorte de « centre d’appel » mutualisé. Dédié à une clientèle premium, soit , mais mutualisé.

Mais le sujet n’est pas seulement au niveau de la mutualisation des ressources mais de leur qualité. En dehors du fait qu’une relation attentionnée et personnalisée dans la durée ne sera plus possible, reste à savoir quel sera désormais le niveau de recrutement. Toujours des profils de type « concierge » ou de « simples » agents de centre d’appel ? On verra.

L’exemple réussi de la Ligne Platinum Air France

Afin de prouver que ce type de dispositif peut fonctionner on citera l’exemple de la Ligne Platinum d’Air France qui est réservée, comme son nom l’indique, aux clients Platinum de la compagnie.

Il s’agit d’une équipe qui se consacre donc à une certaine clientèle avec un niveau d’attention supérieur au service client « normal » et si je me réfère à ma propre expérience ainsi qu’à ce que je peux entendre autour de moi c’est un service qui est très apprécié tant en termes d’efficacité et que qualité de la relation.

Donc le service premium mutualisé fonctionne.

Le statut Marriott Ambassador vaut il toujours le coup et le coût ?

Mais il y a deux différences entre la Ligne Platinum Air France et le Service Ambassador Marriott :

  • Air France n’a jamais promis ou proposé un service individualisé, ce qui est le cas de Marriott. Il y a donc une perception logique de dégradation de la promesse.
  • Air France n’a pas de prérequis de dépenses pour l’atteinte du statut Platinum alors que Marriott demande $20 000 de dépenses.

Ce qui « coince » chez Marriott ce sont les $20 000 ($14 000 en 2021) pour l’accès à un service qui reste premium mais n’est plus individualisé. Si on pouvait comprendre ce seuil pour financer les frais fixes et pour limiter le nombre de membres Ambassador afin de maintenir une bonne qualité de service (là c’était un peu raté), aujourd’hui.

Donc un statut Ambassador à 100 nuits pourquoi pas, à 100 nuits +$20 000 je ne pense pas que les clients suivent.

Un membre qui aurait atteint le statut Titanium a-t-il intérêt à « pousser » pour aller chercher l’Ambassador. Je ne pense pas que cela vaille la peine à ce prix et, pour ce qui est de 2021, je luis conseillerai plutôt d’aller chasser un Diamond chez Hilton plutôt qu’un Ambassador une fois le Titanium atteint.

Photo : Marriott hotel de Cenz07 via Shuttestock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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