Google aura-t-il la peau de Booking et Expedia ? (La réponse est probablement oui)

Après la sortie de Google Hotel Search, Google fait un pas de plus vers une mainmise sur la réservation d’hôtels avec le lancement de « Book on Google ».

Si vous faites une recherche d’hôtel sur Google, vous allez en effet peut être voir apparaitre une fonctionnalité nouvelle.

Lors de la sortie de Google Hotel Search j’avais émis l’hypothèse que Google décide d’aller plus loin et ne résiste pas à la possibilité de jouer un mauvais tour aux OTAs (agences de voyage en ligne). Voilà qui est fait.

Tout commence par une recherche d’hôtel sur Google avec le résultat Google Hotel Search qui s’affiche sur le côté (les OTA qui dépensent une fortune en marketing pour que leurs offres remontent dans les moteurs vont adorer…mais c’est un autre sujet).

Si vous cliquez sur « Réserver une chambre » vous arrivez sur l’écran suivant.

Comme d’habitude Google vous montre la liste des prix disponible aussi bien chez l’hôtelier que chez les OTA, ce qui permet au passage de voir que l’hôtelier fait mal son job. Il laisse en effet les OTA se positionner moins cher que lui alors que s’il proposait le prix le moins cher il économiserait la commission à verser aux OTAs (12 à plus de 20%).

La nouveauté c’est en bas de l’écran avec des photos de chambres associées à des prix.

Et si on clique dessus…

« Google transmettra vos informations de réservation et de paiement en toute sécurité à Novotel Tour Eiffel Hotel qui se chargera du service client une fois votre réservation effectuée »

Qu’est ce que cela signifie ? Que vous pouvez réserver directement par Google mais que Google ne joue pas le rôle d’une OTA, juste d’un intermédiaire.

C’est d’ailleurs très bien expliqué dans les conditions du service…

Google prend toutes les informations et les transmet à l’hôtelier qui s’occupera du service. Google profite qu’il a toutes les informations sur vous (ou vous demande de les donner s’il ne les a pas) afin de simplifier la saisie d’information et rendre vos réservations plus simples. Vous remarquez d’ailleurs la possibilité de payer par Google Pay. Mais vous pouvez également payer par carte bancaire.

Mais vous êtes reconnus comme un client de l’hôtel. Souvenez vous qu’en général quand vous réservez par une OTA vous ne pouvez prétendre aux bénéfices du programme de fidélité de l’hôtel. Google se positionne donc juste comme un facilitateur sans prendre de commission aux hôtels et en leur donnant les données client, ce que ne font pas ou mesquinement les OTAs.

Un grand pavé dans la mare des OTAs

Avec Google Hotel Search les OTAs risquaient de perdre leur rôle de porte d’entrée préférentielle vers la réservation, d’autant plus que la solution de Google permet de facilement comparer tous les prix et se rendre compte que les OTAs ne sont pas toujours les moins chère, et loin de là (à condition que l’hôtelier fasse bien son boulot).

Maintenant elles risquent de perdre leur cœur de business à savoir la réservation, là où elles gagnent de l’argent.

On a du mal de ne pas imaginer que Google fasse tout ce qui est en son pouvoir pour « garder » l’internaute tout au long de son parcours de recherche et d’achat et que les OTAs se retrouvent avec la portion congrue du trafic. Elles ne disparaitront pas écrans mais seront dans une position moins valorisante.

Google le nouvel ami des hôteliers ? Pas sûr !

Là on peut se dire que les hôteliers ne peuvent que se réjouir. Ils retrouvent ainsi une meilleur visibilité par rapport aux OTAs qui disposent de budgets marketing qu’ils n’ont pas pour bien apparaître dans les recherches.

Ils trouvent également dans l’histoire un partenaire qui va faire croitre les réservations directes sans leur prendre de commission. Et on sait bien que si les réservations par OTAs rapportent beaucoup de chiffre elles génèrent très peu de valeur.

Mais…il y a bien sur un mais ! Ne vont ils pas à terme devoir échanger une dépendance (aux OTAs) contre une autre (à Google) qui va bien finir par trouver un moyen de leur faire payer ce surcroit de réservations directe en leur faisant sortir le portefeuille pour améliorer leur positionnement.

On passera d’une compétition entre OTAs à une compétition entre hôtels avec des marges restaurées, mais une compétition qui risque fort de coûter cher par ailleurs à l’hôtelier.

Google le nouvel ami du client ? Pas sûr non plus !

On peut se dire que le client est le grand gagnant de l’histoire ? Façon de voir les choses mais je serai plus précautionneux sur le sujet.

En gardant le client dans l’écosystème Google Travel, en connaissant toutes ses recherches, et en lui demandant de surcroît de lui fournir toutes les informations nécessaires à la réservation, Google se dote d’un moyen de plus de capter des données personnelles à moindre effort, ce dont je suis moyennement fan eu égard à la méfiance naturelle que j’ai vis à vis de cette entreprise.

C’est aussi un bon moyen pour Google de diffuser plus largement Google Pay.

Un modèle économique à trouver

Si l’initiative de Google semble heureuse pour l’hôtelier et le client elle ne peut pas rester « gratuite » longtemps. En 2018 les OTAs (Expedia, Booking etc) ont dépensé 10 milliards de dollars en marketing digital pour s’offrir de bons référencements dans les moteurs de recherche, Google récupérant la plus grande part de cet investissement. J’ai du mal de croire qu’elles vont accepter de continuer à payer autant pour moins de visibilité et, de plus, en finançant ce qui devient désormais un concurrent.

A tous les coups c’est Google qui gagne

Et qui est donc le grand gagnant dans cette affaire ? Les OTAs ? Sûrement pas ! Les hôteliers ? Pas si sûr. Les clients ? Un peu mais avec un prix à payer sur leurs données personnelles.

Comme d’habitude quand Google s’occupe d’un sujet il est souvent le seul gagnant.

« Book on Google » bientôt sur vos écrans

Vous ne trouverez aujourd’hui que peu d’hôtels pour lesquels Google offre cette fonctionnalité en France, le dispositif étant toujours en mode pilote le temps que le moteur de recherche ait développé les partenariats nécessaires pour s’interfacer avec les systèmes de réservation des hôtels. C’est déjà déployé aux Etats-Unis par contre.

Mais attendez vous à le voir débarquer vite !

Photo : Booking.com De Denys Prykhodov via Shutterstock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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