Frontières fermées ou pays à accès restreint, voyages interdits, les compagnies aériennes ont vécu une année 2020 cataclysmique. L’équation à laquelle elles étaient confrontées était quasi insoluble :des avions cloués au sol, des destinations inaccessibles et, pourtant, des gens impatients de retrouver l’atmosphère du voyage que ce soit parce que cela leur manque vraiment ou simplement pour échapper à la tristesse de le quotidien.
Quand les compagnies aériennes font plaisir et se font plaisir
Comment continuer à faire plaisir aux clients alors qu’on a une marge de manœuvre très réduite ? C’est la question à laquelle beaucoup ont essayé de répondre.
On parle bien de faire plaisir aux clients. Contrairement aux hôtels qui ont repackagé leurs offre pour gagner quelques points d’occupation qui peuvent être vitaux, il n’étais pas question pour les compagnies aériennes de trouver des sources de revenus nouvelles, simplement de se faire plaisir en faisant plaisir.
En faisant plaisir à des « travel addicts » cloués au sol et à qui l’expérience de l’aéroport et des avions manquent. Mais contrairement à ce qu’on peut penser la clientèle visée était plus large : aux « avgeeks » de tout poil se sont joint des clients « lambda », pas spécialement fans de voyages, mais qui d’un seul coup ont eu envie de sortir d’un quotidien rendu morne par les multiples restrictions auxquelles ils étaient soumis.
Se faire plaisir car si ces opérations ne rapportent que peu ou pas d’argent, si elles n’ont rien de pérenne et ne préfigurent en rien l’évolution de leurs business model, elles ont eu un triple mérite. Le premier c’est, on l’a vu, de faire plaisir aux clients. Le second de faire plaisir à un personnel condamné à l’inactivité et qui ne demandait que refaire quelque chose d’utile. Le troisième et parfois pas le moindre c’est de faire parler d’elles. Une campagne de notoriété gratuite, quasi mondiale, c’est toujours bon à prendre.
Nous vous proposons ainsi un tour d’horizon des différentes initiatives qui ont vu le jour.
Un vol qui ne quitte pas le tarmac
En juillet, China Airlines (compagnie de Taiwan comme son nom ne le dit pas) avait ainsi proposé un vol en conditions quasi réelles : enregistrement, contrôles de sécurité, contrôles de police…mais l‘avion n’a jamais décollé. L’idée était juste de revivre ce petit bout d’expérience.
Vols vers nulle part
Quand on ne peut aller nulle part et qu’on a envie de voler la seule solution est de décoller pour revenir se poser à son point de départ.
Les « vols vers nulle part » dédiés aux passagers en manque de voyage ont connu un vrai succès pendant la crise sanitaire.
Pour Qantas qui a vendu une « boucle » de 7h à des prix allant de 500 à 2300 euros il s’est agit du vol le plus rapidement vendu de l’histoire la compagnie. Quelques dizaines de minutes pour vendre 134 billets.
China Airlines, quant à elle a fini par enfin se décider à faire décoller ses avions et a organisé des vols vers nulle part au départ de Taipei.
Les enfants n’étaient en reste puisque EVA Air (Taiwan toujours) a fait voler en boucle un de ses appareils aux couleurs de Hello Kitty.
Même chose chez ANA avec une ambiance plus Hawaienne à bord cet A380 qui dessert habituellement la route Tokyo-Honululu.
Il a fallu à chaque fois moins de 48h à Royal Brunei pour vendre les 85 places de son package « Dine & Fly » au dessus de l’île de Borneo.
Un dîner en première
Chez Singapore Airlines on s’apprêtait également à jouer la carte des vols vers nulle part mais quelques défenseurs de l’environnement on eut raison du projet.
Qu’à cela ne tienne, la compagnie singapourienne a proposé à ses clients une expérience de diner …au sol. Ainsi un A380 de la compagnie a été transformé en un restaurant éphémère qui n’a jamais quitté le tarmac mais permettait de revivre (voire de découvrir pour certains), l’excellence du service de la compagnie dans toutes les classes de voyage et donc notamment en première. Plus de créativité également pour le cuisinier qui n’avait plus à subir les contraintes propres au service en cabine et en altitude.
Il a fallu 30 minutes pour vendre 900 places et il a même fallu ouvrir une liste d’attente !
Le Speed Dating en l’air
Hello Kitty c’est bien pour les enfants mais les (jeunes) adultes en veulent un peu plus.
EVA Air s’est associée à la société de rencontres local Mobius pour proposer des vols « Love is in the Air ». Les participants pourront participer à un speed dating en plein vol le jour de Noël, la veille du jour de l’An ou le jour de l’An, tout en dégustant une cuisine gastronomique étoilée au Michelin et en profitant d’une vue imprenable.
Chaque vol durera environ trois heures. Le quota pour chaque vol varie, mais Mobius affirme que chaque vol transportera de 16 à 20 hommes et le même nombre de femmes. Mieux encore, chacun se verra attribuer un « compagnon de siège » du sexe opposé. Le choix des places sera impossible donc les passagers seront installés de manière aléatoire mais seront invités à se déplacer autant que possible pendant le vol pour faire de nouvelles rencontres.
Critère important pour avoir le droit de participer à ces vols : il faut être diplômé de l’enseignement supérieur ! Les hommes devront également avoir entre 28 et 38 ans et les femmes entre 24 et 35.
Vol boudhiste au dessus de Thailande
Si la religion et la paix de l’âme vous attirent plus que la drague alors c’est vers Thaï Airways qu’il faut vous tourner.
La compagnie Thailandaise lance un vol de pèlerinage bouddhiste spécial, au cours duquel les passagers peuvent chanter des mantras tout en survolant des temples. Ce vol de trois heures survolera 99 sites sacrés en Thaïlande, afin que « les passagers recevront une énergie positive en chantant ».
Les réservations sont closes depuis hier. La classe économique était au prix de 6000 bahts (166€) et la classe affaires à 10 000 bahts (277 €).
Puissent également ces prières sauver la compagnie de la ruine, issue qui est à craindre vu sa santé actuelle.
Une nuit glamour à l’aéroport
Vous êtes un fan du film « le Terminal » et rêvez de vous prendre pour Tom Hanks ? Et bien c’est possible.
Quitte à être enfermé dans un aéroport autant choisir le meilleur, c’est à dire Changi à Singapour. Depuis le 20 novembre et jusqu’au 3 janvier, il est possible de passer la nuit à l’aéroport et de dormir à la belle étoile.
L’offre « Glampication in the clouds », permet aux clients de passer une nuit dans une yourte au plus haut étage de l’aéroport avec des couvertures et des oreillers.
Autre expérience dans l’aéroport de Singapore Changi, la Shiseido Forest Valley propose des yourtes plus spacieuses qui peuvent accueillir jusqu’à 3 adultes.
Les deux offres valent le même prix : 200 € en semaine et 220 le week-end.
Les clients qui profiteront de ces offres auront également droit à d’autres « avantages » tels que :
Billets pour le Changi Experience Studio ou Manulife Sky Nets
Billets pour la canopée
Noël étincelant au Jewel (voir notre reportage sur le Jewel ici).
Peluche Dinosaure du Jurassic Mile
Jewel Privilege Pass pour des réductions sur les achats
Si passer une nuit dans une yourte ne vous enchante pas, vous pouvez vous contenter de pic-niquer à l’aéroport de Changi. L’aéroport fournit des nappes, des couverts, une glacière avec des glaçons et des verres à vin, et vous apportez votre propre nourriture et vos boissons. Les créneaux horaires de trois heures sont disponibles pour 100€ en semaine 160€ le week-end.
L’Asie créative, l’Europe absente
On regrettera juste que toutes ces initiatives se soient limitées globalement à l’Asie. On aurait aimé voir les compagnies européennes un peu plus créatives de ce côté.
Photo : vol annulé pour cause de COVID de BNMK 0819 via Shutterstock