Aérien : pour quand attendre le redécollage ?

Après l’hiver vient le printemps et chaque jour qui passe nous rapproche de celui ou nous reprendrons possession de nos rues, de nos bars, de nos aéroports, avions et hôtels. Oui, mais quand.

Retour à la normale : 3 mois ou 3 ans ?

La semaine dernière La Tribune nous informait que les compagnies françaises prévoyaient un retour à la normale en juillet. Pour être plus précis un redémarrage en mai, une montée en puissance en juin et un retour à la normale en juillet. Plutôt fin juillet à notre avis.

Oxford Economics pense, par contre que le retour à la normale prendra 3 ans. Des points de vue irréconciliables ? Non.

Du côté des compagnies françaises on parle de la remise en marche du programme de vol. Mais d’ici à ce que le remplissage et la rentabilité soit au rendez vous cela prendra plus longtemps surtout que dans un climat d’incertitude voire de peur, la relance se fera à coup de promos pour accélérer. Du côté Oxford Economics on parle de retour à la normale de l’ensemble de l’économie(seulement un aparté sur le travel) et avec un prisme très orienté US où il y a de fortes chances que l’après COVID-19 ne ressemble en rien à ce qu’il sera en Europe. D’un côté des licenciements massifs (on attend 20% de chômage) qui obligeront à réembaucher voire former (ce qu’on a connu après 2008) et diffère le retour à la normale d’un ou deux ans. De l’autre, autant que possible, le maintien à tout prix des emplois pour repartir vite, la leçon de 2008 ayant visiblement été apprise.

Mais même s’il ne s’agit que d’un retour à la normal « technique », les hypothèses françaises ne sont-elles pas trop optimistes ?

Un redémarrage par secteur

Parlant de l’industrie du voyage au sens large, on peut s’attendre à un redémarrage par secteur avec l’hôtellerie qui repartira avant l’aérien. Pourquoi ?

D’abord parce qu’il est plus simple de réouvrir un hôtel qui a fermé et a fortiori de relancer un hôtel en activité réduite que de relancer le programme de vol d’une compagnie aérienne.

Ensuite parce que les frontières se réouvriront une par une et peu à peu. Pour une compagnie aérienne (surtout en Europe), on risque fort de démarrer par les lignes intérieures (car le reste sera fermé), puis peu à peu le moyen courrier et le long courrier. Et pour une compagnie européenne relancer les vols intérieurs c’est relancer pas grand chose et pas grand chose de rentable. Alors qu’un hôtel peut plus facilement se relancer sur une clientèle nationale.

Un redémarrage par zone

Si, on l’a dit, il y a fort à parier que l’activité des compagnies aériennes ne reparte que sur un petite périmètre géographique avant de s’étendre, toutes les parties du globe ne repartiront pas en même temps.

Et sans surprise on peut parier que le calendrier de redémarrage va suivre celui de la pandémie : Asie, Europe, Moyen Orient, Océanie, Amérique du Nord.

Quoique le cas de l’Europe restera spécial vu que l’arrivée de la pandémie, sa propagation et les actions des pouvoirs publics n’on rien d’uniforme. Quant aux Etats-Unis on peut parier qu’ils s’en sortiront longtemps après les autres.

Une réouverture progressive

Redémarrer n’est pas s’ouvrir. Que la chine relance ses vols intérieurs est une chose, qu’elle rouvre les portes largement aux étrangers mettra plus de temps. Idem pour Singapour. Donc il se passera du temps entre le moment où, par exemple, l’aérien repartira en France et le moment où les français seront de nouveau autorisés à se rendre dans certains pays.

On peut même envisager un scénario « catastrophe ». Que la pandémie soit stoppée par exemple en France, en Italie et en Espagne et qu’elle fasse un carton en Suède, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas. Si les pays étrangers prennent comme référence non pas les pays mais l’espace Schengen (ce qui ne serait que trop logique), la capacité pour les ressortissants d’un pays à être autorisés à voler vers un autre ne dépendra pas de la situation infectieuse de ce pays mais de celui de sa zone géographique. Autrement dit, la dangerosité des ressortissants d’un pays sera considérée comme égale à celle du plus mauvais élève de sa zone géographique. A moins qu’on oublie Schengen pour un temps, que chaque pays membre se protège des autres et ne s’ouvre qu’au cas par cas pour protéger sa capacité à s’ouvrir au monde. Ce qui n’est pas utopique car techniquement on en est déjà là.

Il faudra donc séparer (même si ça restera lié) la capacité d’une compagnie à voler et celle qu’elle aura à emmener ses nationaux dans certaines parties du globe. Celles qui ont la plus grosse clientèle de transit repartiront peut être plus vite.

Alors la reprise du travel c’est pour quand ?

Quand on lit tout cela on peut trouver très optimiste la position des compagnies françaises non ? Pas forcément. Nous partons du principe qu’elles discutent avec les services de l’Etat et bénéficient de prévisions dont nous ne bénéficions pas. Quoique par les temps qui courent qui fait confiance aux prévisions….

Qu’Air France fasse revoler des avions entre mi et fin mai n’a rien d’illusoire, en tout cas aujourd’hui. Mais à mon avis uniquement pour les vols intérieurs. On pourra peut être espérer aller en Europe d’ici Aout, en Asie en automne, aux USA au début de l’hiver ? On peut même imaginer que son réseau long courrier à Paris ne soit fait que de correspondances au début avec interdiction d’emmener des passagers français hors de l’espace Shengen.

KLM a d’ores et déjà annoncé son programme de vol avec un redémarrage début avril avec 57 destinations. Mais même avec un nombre aussi faible, même si on a envie d’y croire, on a de nombreux doutes. Mais rien n’empêche de se préparer pour, dès fois que les astres s’alignent.

Alors oui vous reprendrez sûrement l’avion d’ici 3 mois. Mais sans garantie d’aller très loin même si on aimerait se tromper. Chez TravelGuy on a envie de rêver mais on préfère être réalistes car on sait désormais que le pire est toujours possible.

De toute manière le process de retour à la normale sera très complexe. On vous tiendra informés autant que possible.

Photo : redécollage de frank_peters via Shutterstock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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