Alitalia : dernière chance pour le gouvernement, Lufthansa pose ses conditions

On en sait désormais un peu plus dans l’interminable feuilleton de la reprise ou de disparition, on ne sait plus, d’Alitalia.

Après les derniers rebondissements où le dernier plan de reprise crédible s’est effondré suite au retrait de certains investisseurs ce qui a conduit l’Etat à accorder un nouveau prêt relais pour permettre à la compagnie de continuer d’opérer, on y voit un peu plus clair.

Une date butoir mais le besoin d’en finir au plus vite

La date butoir pour trouver une solution pour la compagnie Italienne est désormais fixée au 31 mai 2020. Une date qui ne veut a priori absolument rien dire tant elle a du être repoussée à de nombreuses reprises depuis 2017 et le début des ennuis d’Alitalia.

Pour autant chez TravelGuys on pense que tout sera fait pour trouver un dénouement avant et ce pour différentes raisons.

  • Rien ne dit que la compagnie tiendra jusque là avec les 400M€ d’argent frais qu’on vient de lui apporter.
  • L’Europe commence à regarder de très près ce qui pourrait commencer à ressembler à des subventions déguisées et donc illégales.
  • Sans argent public la compagnie n’est aujourd’hui plus viable et on sait bien que les réserves de l’Etat Italien ne sont pas infinies.
  • Pendant ce temps Air Italy financée par Qatar Airways fait son chemin et veut devenir la première compagnie italienne. Tout retard pour Alitalia est du temps gagné pour Air Italy et les Qatari.

Autant de raisons qui poussent l’administrateur de la compagnie et l’Etat à trouver une solution au plus vite et bien avant l’expiration de ce délais.

Deux options crédibles pour Alitalia

En finir pour arriver à quoi ? L’Etat a 3 options dont seules deux nous semblent valables.

La première consiste bien évidemment à trouver un repreneur et même si personne ne se bouscule au portillon sans garanties c’est bien entendu la solution privilégiée.

La seconde est la nationalisation et semble inéluctables si des capitaux privés ne viennent pas au secours de la compagnie.

Car en effet la troisième est la disparition pure et simple de la compagnie. C’est à notre avis une option que le gouvernement souhaite absolument éviter en raison du choc que cela provoquerait d’un point de vue économique avec la disparition de 12 000 emplois mais aussi du point de vue de l’image avec la disparition d’un élément du patrimoine national !

Le gouvernement fait les yeux doux à Lufthansa

D’abord regardée de loin avant qu’elle ne se retire et revienne en force, la piste privilégiée est aujourd’hui une reprise d’Alitalia par Lufthansa. Oui, mais…

Lufthansa ne viendrait pour faire une œuvre sociale mais pour gagner de l’argent et rendre la compagnie profitable, domaine dans lequel elle a montré son savoir faire avec Swiss, Brussels Airlines et Austrian.

Concrètement parlant les allemands son pragmatiques et ne mettront ni un orteil ni un euro dans Alitalia tant que celle-ci n’aurait pas montré par des faits et des actions concrètes qu’elle a décidé de se restructurer car comme ils le disaient il y a peu, ils « ne sont pas intéressés par investir dans l’Alitalia actuelle mais dans une nouvelle Alitalia ».

C’est donc aujourd’hui à la compagnie mais, on le sait bien, au gouvernement de prendre les bonnes décisions afin d’habiller la mariée et la rendre acceptable pour le groupe allemand.

Et là on commence à en savoir plus sur les exigences allemandes qui commencent à fuiter dans la presse.

Quelles sont les exigences de Lufthansa ?

• Réduction de la flotte de 30%

• Vente des divisions de manutention bagage et maintenance (qui feraient redondance avec les services de Lufthansa Group.

De manière très diplomatique pour ne pas échauffer l’opinion publique et les syndicats ni mettre le gouvernement en porte à faux on ne parle pas ici de licenciements mais avec la vente d’une partie des activités de l’entreprise on y est. Et on n’imagine pas une réduction de 30% de la flotte sans réduction des effectifs qui vont avec.

Que propose Lufthansa en échange ?

Si Alitalia avance dans la voie demandée, Lufthansa promet d’investir dans un premier temps 160 millions d’Euros dans la compagnie Italienne. Pas énorme mais il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui criblée de dettes et sans cash Alitalia est une coquille vide qui ne vole plus que grâce à de l’argent public, ce qui ne peut plus durer.

Cadeau bonus qui fera certainement grincer des dents à Roissy et Schiphol, Lufthansa mettrait 50 millions de plus si Alitalia décidait de quitter Skyteam pour rejoindre Star Alliance.

Notre pronostic

La solution Lufthansa a de tout temps eu notre préférence en raison du savoir faire démontré en matière de redressement de compagnies. D’un autre côté le gouvernement italien est coincé par la pression populaire qui ne tolérerait ni une perte massive d’emplois ni la disparition de sa chère compagnie nationale.

Notre pronostic donc est que :

1°) Le gouverment Italien va annoncer qu’il fera les concessions nécessaires en demandant quelques assouplissements pour montrer qu’il s’est battu pour sauver ce qui pouvait l’être. On peut même penser que dans ses demandes Lufthansa a déjà inclus ces marges de manœuvres pour permettre au gouvernement de ne pas perdre la face.

2°) Sous la pression de la population et des syndicats rien ou presque ne sera fait.

3°) Lufthansa se retirera.

4°) L’Etat se rendra compte qu’il n’a pas les moyens d’entretenir une compagnie structurellement déficitaire donc pas de nationalisation possible.

5°) Faillite d’Alitalia et revente par appartements « à la casse ».

6°) Les autres compagnies dont, à notre avis, en priorité Lufthansa, Easy Jet et Air Italy se servent « sur la dépouille de la bête ».

Mais on peut toujours espérer.

Photo : Avion Alitalia derrière un grillage de MOZCO Mateusz Szymanski via Shutterstock

Bertrand Duperrin
Bertrand Duperrinhttp://www.duperrin.com
Voyageur compulsif, présent dans la communauté #avgeek française depuis la fin des années 2000 et passionné de (longs) voyage depuis sa jeunesse, Bertrand Duperrin a cofondé Travel Guys avec Olivier Delestre en mars 2015. On peut le retrouver aussi aussi sur http://www.duperrin.com où il parle depuis plus de 10 ans de la transformation digitale des organisations, son métier quand il est au sol.
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